L'hydrogène, énergie du futur pour les mobilités...

L'Etat accélère le développement des énergies propres !

27 juillet 2021
L'hydrogène est l'avenir pour les transports publics "L'hydrogène est l'avenir pour les transports publics"
Soutenue par le gouvernement et particulièrement le Président de la République, la filière hydrogène va recevoir, dans le cadre du Plan de Relance 7 milliards d'euros, dont 2 milliards en 2021 et 2022, pour devenir l'un des principaux piliers de la transition énergétique. L'hydrogène bientôt dans les bus réunionnais plus vite qu'on y croit.

Par Lilian Reilhac

Bus à hydrogène, bateaux à hydrogène, trains à hydrogène et voire même avions à hydrogène, tels sont les projets sur lesquels travaillent d’arrache pied de nombreux ingénieurs depuis ces dernières années afin de réduire l’usage des énergies fossiles et nucléaire. Dans cette course à la transition énergétique, l’hydrogène est, au vu de son abondance sur Terre, considérée par les experts comme une énergie illimitée pour alimenter les systèmes électriques, véhicules, industries... bref, pour nos usages quotidiens.

Il faut savoir qu’aujourd’hui 95% de la molécule d’hydrogène est produit à partir des hydrocarbures. Mais à la différence de l’eau le processus émet énormément de dioxyde de carbone (CO2). C’est pour cela que le gouvernement a insisté dans son plan de relance pour développer l’hydrogène décarboné, c’est à dire qui n’utilise ni ne génère de CO2 dans la chaîne de production. C’est aujourd’hui possible par l’extraction de la molécule d’hydrogène de l’eau par le procédé d’électrolyse. Ainsi, un courant électrique permet de séparer hydrogène et oxygène, le gaz obtenu est ensuite décarboné ou vert selon si l’électricité utilisée provient des énergies renouvelables.

La France espère développer l’électrolyse afin de décarboner une partie de l’industrie en évitant chaque année l’émission de neuf millions de tonnes de CO2, soit 3% des émissions françaises, due à la production d’hydrogène à partir des hydrocarbures.  

Dans cette stratégie nationale du développement de l’hydrogène, le secteur de la mobilité et des transports occupent une place prépondérante. 

Si l’Etat mise autant sur l’hydrogène c’est parce qu’il va sans aucun doute révolutionner notre société et notre vie quotidienne. Certains économistes, comme Jérémie Rifkin estime que l’hydrogène sera l’un des cinq piliers de la troisième révolution industrielle. En se projetant en 2100, il devrait, selon les experts, avoir plus de transports en commun grâce à l’hydrogène. En attendant, le 25 mai dernier, comme pour illustrer la détermination de l’Etat, la tour Eiffel fut entièrement illuminée grâce à un groupe électrogène alimenté avec de l’hydrogène décarboné.

On en parle depuis quelques décennies, l’hydrogène fait de plus en plus son apparition dans les transports publics dans l’hexagone. Des véhicules qui rejettent de la vapeur d’eau à la place du CO2, est devenue une réalité grâce aux piles à combustible. Ainsi, dans un proche avenir, nombreux sont les bus et les voitures électriques qui fonctionneront grâce à l’énergie produite à partir de l’hydrogène et à l’air. 

Il y a deux ans, une première ligne de bus hydrogène a été mise en service en France sur l’agglomération de Pau dans le Béarn Pyrénées. ENGIE et sa filiale GNVERT se sont associés pour la fabrication et l’exploitation d’une station de recharge pour une flotte de huit bus équipés de piles à combustible. 

A la Réunion, des projets de véhicules à hydrogène ont vu le jour depuis l’année dernière. Aux dernières nouvelles, le Covid-19 aurait même permis une accélération de ces projets innovants. Le plus avancé est sans aucun doute celui du groupe Transdev associé à la référence mondiale des énergies renouvelables, le groupe Akuo, spécialisé dans le développement de l’hydrogène. L’objectif est de décarboner les transports en commun à La Réunion. Les enjeux d’une électricité « verte » dans le secteur des transports sont considérables. D’abord écologique avec la quasi disparition des 154 gCO2 produit par passager et par km en moyenne avec les moteurs thermiques actuels. Ensuite, économique, puisque les opérateurs de réseaux n’auront plus à faire appel aux carburants fossiles. L’installation consiste à construire un champ de photovoltaïque afin de produire l’électricité « verte », d’un électrolyseur pour consommer l’électricité « verte » et la convertir en hydrogène, d’un stockage tampon d’hydrogène et enfin  d’une station d’approvisionnement des bus.

Un partenariat public privé pour lancer l’hydrogène à La Réunion

Si en métropole l’hydrogène est produite à partir du fossile, à la Réunion l’approche est différente. « Nous avons réfléchi différemment, car ici nous bénéficions d’un avantage majeur, le soleil qui nous permet de produire une énergie verte et ainsi de décarboner la production d’électricité. L’hydrogène est aussi une solution pour limiter le poids des batteries dans les bus. Car les batteries sont lourdes et prennent beaucoup de places et ce au détriment des usagers », explique Damien Joliton responsable Bureau d’Etudes et Méthodes chez Transdev. 

Pour cet ingénieur, l’hydrogène est un vecteur énergétique très avantageux car c’est une façon d’embarquer de l’énergie dans le véhicule. Ce qui le rend plus efficace et plus performant. Pour les bus qui effectuent en moyenne 200 km par jour, une batterie rechargeable avec de l’électricité renouvelable installée à bord du véhicule, avec un temps de recharge limité à 6h trouve son intérêt. Un plein de recharge d’une durée de 10 mn pour un bus et qui s’effectue la nuit afin d’exploiter au maximum le bus durant la journée. « Autre avantage de l’hydrogène à La Réunion, les dénivelés qui sollicitent énormément les moteurs thermiques et que les puissants moteurs électriques peuvent franchir sans difficultés et surtout sans diffuser du carbone dans l’air », soutien Damien Joliton. 

Transdev et Akuo proposent dans un premier temps un projet pilote « Zéro émission » sur la ligne 31 du réseau urbain Citalis, et qui assure la desserte de Sainte-Suzanne au Chaudron. Contrairement aux lignes hydrogène de Pau, cinq véhicules électriques de 70 places seront mis en service, à titre expérimental, sur le réseau urbain du Nord Est pouvant chacun effectuer environ 200 km par jour, soit l’équivalent de 60 000 km/an. 

30 M€ d’investissements nécessaires

Le projet déjà présenté à la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), autorité encadrant les installations de production d’énergie, en décembre 2020, a reçu un accueil très favorable. De quoi donner des ailes aux promoteurs du projet qui ont trouvé un allier de poids, la Cinor disposé à accompagner Transdev et Akuo, notamment sur leur besoin de foncier. L’installation de 2 700 m2 de panneaux photovoltaïques sont nécessaires à la réalisation de la station de recharge qui doit impérativement se situer dans les bas afin d’éviter les km superflus pour les bus. Sur cette problématique, le Sidelec (Syndicat intercommunal d’électricité de La Réunion) est également partie prenante. Le président du Sidelec étant également Président de la Cinor, la passerelle entre les deux institutions devrait être facilitée. Lors de l’assemblée générale de la CGTR, Maurice Gironcel avait abordé le sujet en mettant en avant l’urgence pour La Réunion de réaliser ce projet hydrogène. La collectivité a, par ailleurs, déjà donné son feu à la Sodiparc, exploitant du réseau urbain Citalis, comme opérateur pilote pour l’expérimentation sur la ligne 31. 

D’un coût estimé à 30M€ dont 10M€ pour le système hydrogène et 10M€ pour l’acquisition des bus et leur aménagement. Les projets de développement de l’hydrogène sont particulièrement bien dotés par des aides de l’Etat qui tournent autour de 50% au minimum auxquelles peuvent s’ajouter celles de l’Europe. 

Pour l’heure aucune date de mise en service de cette expérimentation n’a été fixée. Le dossier est toujours en instruction auprès de l’autorité des énergies. Mais les échéances électorales passées, le projet devrait connaître une accélération. 

Le renouvellement des DSP dans la ligne de mire

Les constructeurs de bus comme Mercedes, Iveco, Man, y compris les constructeurs chinois, ont tous annoncé qu’ils ne figureront plus des bus ou cars à moteur thermique dans leur catalogue. Et pour cause, dés 2035, ils n’auront plus le droit de fabriquer des moteurs diesel pour les bus. 

La fin du diesel approchant à grands pas, l’alternative la plus plausible reste, à l’heure actuelle, l’hydrogène. Ce qui explique pourquoi de nombreux constructeurs planchent activement sur le sujet, même si tout reste à faire : développer les mécaniques, augmenter la production d’hydrogène propre et économique, installer un réseau de stations… Pour faciliter la transition, le gouvernement est prêt à « accélérer les aides » déjà existantes, à savoir un équivalent de la prime à la conversion mais pour poids lourds, qui s’élève actuellement à 50.000 € pour un camion et 30.000 € pour un bus.

Au delà de l’aspect écologique, le projet d’hydrogène porté par Transdev et Akuo avec la Cinor a un intérêt majeur pour les entreprises de transports de voyageurs à trois ans du renouvellement de la plupart des DSP (délégation de service public). En effet, La Région doit relancer la procédure de renouvellement du contrat d’exploitation du réseau interurbain Car jaune dés 2023. Idem dans la foulée pour Alternéo, Citalis et Kar’Ouest. Il est fort probable que les collectivités vont exiger dans leur cahier des charges, une obligation contractuelle pour des véhicules respectant la transition énergétique. Aujourd’hui la Civis vient de commander six nouveaux bus électriques à la société Bluebus de Bolloré. A la Cinor et au TCO on envisage la même démarche. 

Désormais, le temps semble compté pour les acteurs des transports de voyageurs de La Réunion dans cette course à la transition énergétique.

Comment ça marche ?

Pour produire de l’hydrogène « vert », la méthode la plus efficace est l’électrolyse de l’eau. Elle consiste à décomposer l’eau en dioxygène et en hydrogène, grâce à un courant électrique de source renouvelable. L’hydrogène ainsi séparé peut être stocké de manière pérenne jusqu’à son utilisation, pour faire rouler un véhicule, un bus. En cela l’hydrogène est aujourd’hui un formidable vecteur de stockage des énergies renouvelables. Les bus électriques à hydrogène sont des bus dont l’énergie est stockée sous forme d’hydrogène : l’électricité est donc produite en temps réel à bord du véhicule au moyen d’une pile à combustible. Le projet d’hydrogène réunionnais est d’autant plus innovant que pour produire l’hydrogène, on utilise non pas l’électricité du réseau EDF mais celle produite par des photovoltaïques, c’est ce qu’on appelle une « énergie verte ». 

RESTEZ INFORMÉS, ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER

ABONNEZ-VOUS À LA NEWSLETTER !